Washington imposent des sanctions commerciales à l’Union européenne

Les États-Unis ne préserveront pas l’Union européenne plus longtemps. Le secrétaire américain au Commerce Wilbur Ross a annoncé ce jeudi 31 mai que les États-Unis allaient appliquer vendredi d’importants tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium importés de l’Union européenne, du Mexique et du Canada.

Les États-Unis ont donc décidé de ne pas prolonger l’exemption temporaire accordée à l’Union européenne jusqu’à jeudi minuit et vont mettre en place des taxes de 25% sur l’acier et de 10% sur l’aluminium. Le sursis sur ces taxes est également levé pour le Mexique et le Canada, ses deux partenaires de l’accord de libre-échange nord-américain (Aléna) dont la renégociation, entamée il y a dix mois, peine à aboutir.

Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a immédiatement annoncé que l’Union européenne allait « annoncer dans les prochaines heures des contre-mesures ». « L’Union européenne ne peut pas rester sans réagir (…) Ce qu’ils peuvent faire, nous sommes capables de faire exactement la même chose », a-t-il affirmé, lors d’une conférence à Bruxelles. Mexico a également annoncé des représailles.

Emmanuel Macron a annoncé qu’il allait s’entretenir avec Donald Trump dans la soirée. Il a déploré, devant des journalistes, une « décision illégale » et une « erreur ».

La diplomatie française a de son côté jugé ces taxes « injustifiées et injustifiables ». Le secrétaire d’État français aux Affaires étrangères, Jean-Baptiste Lemoyne, a estimé que les États-Unis avaient apporté « une mauvaise réponse » à « l’urgence de refonder le commerce international ». En marge de la réunion annuelle de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à Paris, il a appelé Bruxelles à répondre en prenant des mesures de sauvegarde et de « rééquilibrage ». « Aujourd’hui, en matière de commerce international, nous dansons au bord du gouffre », a-t-il alerté.

La France ne négociera pas avec les Etats-Unis « sous la pression » des taxes douanières, a déclaré de son côté le ministre français de l’Economie Bruno Le Maire. « Nous refusons de négocier sous la pression. J’ai rencontré ce matin (le secrétaire américain au Commerce) Wilbur Ross et je lui ai clairement signifié que les pays de l’Union européenne n’accepteront jamais de négocier sous la pression », a-t-il déclaré à la presse alors depuis Montréal.

« Je tiens une promesse »

Wilbur Ross qui s’exprimait lors d’une conférence de presse téléphonique alors qu’il était à Paris pour la réunion de l’OCDE, a précisé que les États-Unis ne voulaient pas accorder aux 28 pays membres de l’UE « une exemption permanente et inconditionnelle sur les tarifs ». « Nous avons eu des discussions avec la Commission européenne et même si nous avons fait des progrès, ils ne sont pas allés jusqu’au point où il aurait été justifié soit de prolonger l’exemption temporaire, soit d’accorder une exemption permanente », a affirmé le ministre de Donald Trump.

Le président américain avait signé le 8 mars, depuis la Maison Blanche, les documents controversés imposant ces taxes et marquant un net virage protectionniste, 13 mois après son arrivée au pouvoir. « Je tiens une promesse que j’ai faite en campagne », a lancé Donald Trump, assurant que les États-Unis, avaient, pendant des décennies, été victimes de pratiques commerciales qu’il a assimilées à une « agression ».

Dans un communiqué, la Maison Blanche a assuré que l’imposition des tarifs sur l’acier, déjà en place pour le Japon, la Chine, la Turquie et la Russie notamment, avait « un impact positif majeur sur les emplois ».

De nouveaux droits de douane sur les produits américains ?

Wilbur Ross a minimisé les risques de représailles de la part de l’UE, du Mexique et du Canada, et ajouté qu’il y avait « un potentiel de discussion » avec l’Union européenne. Mais, a-t-il ajouté, « comme nous ne savons pas quelle va être leur réaction à l’idée de continuer les discussions » malgré l’imposition des tarifs, « il est un peu prématuré pour savoir quels seront les sujets de ces négociations ».

L’Union européenne avait exigé l’exemption définitive de ces taxes douanières comme tout préalable aux négociations. Les Européens, France en tête, ont insisté sur le fait qu’ils ne pouvaient discuter en ayant une épée de Damoclès au-dessus de leur tête, qui plus est de la part d’un allié commercial.

« Les États Unis ne nous laissent pas d’autres choix que de porter ce conflit devant l’OMC et d’imposer des droits de douane supplémentaires à un nombre de produits en provenance des USA », a expliqué Jean-Claude Juncker, cité dans un communiqué. Cette procédure devant l’Organisation mondiale du Commerce (OMC), qui peut durer des années, devrait être lancée le vendredi 1er juin, précise le communiqué de la Commission.

 

De son côté, la Commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström, a rappelé, dans le même communiqué, que « nous (l’UE) avons fait tout ce que nous avons pu pour éviter ceci », soulignant qu’elle avait parlé ces derniers mois en de multiples occasions au secrétaire américain au Commerce Wilbur Ross.

Angela Merkel a quant à elle jugé les taxes américaines « illégales » et redoute un « risque d’escalade ». Le gouvernement allemand a immédiatement promis que la réponse à « l’Amérique d’abord » sera « l’Europe unie » avertissant que « les guerres commerciales ne connaissent aucun vainqueur ».

Nul doute que la décision américaine va être au centre des discussions du G7 Finances qui débute jeudi à Whistler au Canada.